Bérengère
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Series | Les Vestiges |
HOMMAGE À LA REINE BÉRENGÈRE DE NAVARRE,
UN CORPS-BÂTIMENT
Cette pièce a été conçue à l’occasion d’une exposition en 2018 dans ma ville natale au Mans. Une grande partie de mon travail en céramique et de dessin dialoguait avec les collections du musée de Tessé (musée des beaux-arts) et celles du musée de la reine Bérengère, musée consacré à l’histoire de la céramique populaire sarthoise (il n’existe plus aujourd’hui)
Mais qui est cette reine Bérengère dont on a donné le nom à cet improbable musée du Mans ? Telle est la question que je me suis posée en 2017 lorsque j’ai été invitée à présenter un ensemble de céramiques dialoguant avec celles des collections du musée.
Bérengère de Navarre, choisie par Aliénor d’Aquitaine pour épouser son fils Richard Cœur de Lion en 1204 est devenue douairière lors de son veuvage. La Dame du Mans a fondé l’Abbaye de l’Épau. Selon une légende elle serait morte dans la maison du musée et hanterait les lieux, au cœur de la cité Plantagenêt. Le Mans étant ma ville natale, je me suis appropriée l’histoire de cette Reine, peu connue, pour en faire une sculpture céramique.
Bérengère de Navarre est une figure romanesque et elle m’a inspirée cette construction néo-féodale, telle une cathédrale d’argile associant l’idée de la chair (d’un corps) et celle d’un bâtiment aux formes architecturales que l’on retrouve dans la Cité Plantagenêt.
Dans une niche apparait le portrait de la reine en 3D, et sur le côté, les animaux figurants aux pieds de son gisant (Lion et chien) entreposé à l’abbaye de l’Épau. Sur la surface d’une autre, on peut y voir son portrait dessiné. Sur les angles du bâtiment surgissent des échauguettes moyenâgeuses comme on en trouve sur les maisons dans la cité Plantagenêt. Un autre bloc présente une fenêtre directement inspirée de la cathédrale Saint-Julien. Encore un autre montre une ouverture dont le dessin reprend celui que l’on peut trouver sur les arcades du cloître de l’abbaye de l’Épau.
Bérengère de Navarre (v. 1160-1230)
Baury Ghislain (aut.), Corriol Vincent (aut.)
Vincent Nicholas (préface)
La vie de la reine Bérengère de Navarre possède quelque chose de romanesque : princesse hispanique, aînée de l’une des dynasties les plus modestes de la péninsule, elle devient l’épouse de l’un des souverains les plus célèbres d’Angleterre. Les épisodes d’une trajectoire hors norme, depuis la rencontre avec Richard à Messine, le mariage à Limassol suivi de son couronnement, enfin le séjour en Orient jusqu’à son retour en Europe, marqué par la longue captivité du roi, constituent autant de péripéties qui ont fasciné les contemporains, puis, après eux, historiens, artistes et hommes de lettres jusqu’à aujourd’hui.
La mort du roi Richard la place dans la situation d’isolement dévolue aux reines veuves et sans héritier, dont le retrait au couvent constitue souvent le seul horizon. Elle choisit cependant de se démarquer en élisant une vie active, assumant le gouvernement et l’administration de la ville du Mans et de ses environs.
Bérengère n’a ainsi pas connu l’effacement dans l’anonymat que connaissent nombre de personnages féminins de cette époque. Tout autant que les étapes de sa vie, les étapes de la construction mémorielle du souvenir de la souveraine constituent un objet d’attention, d’abord parce que Bérengère s’est attachée elle-même à construire et organiser la perpétuation de sa mémoire, au moyen du monument mémoriel que constitue l’abbaye de l’Épau. Si elle n’est pas la seule reine à fonder un couvent destiné à abriter sa sépulture, son geste demeure atypique puisque la fondation n’est dédiée qu’à elle-même. Le gisant qu’abrite l’abbaye est devenu le catalyseur d’une mémoire plurielle, bien vivante aujourd’hui, tant au Mans qu’en Navarre, à Chypre ou en Angleterre.
. Bérengère, 2017-2018 – Grès émaillé, 210 x 90 x 50cm. Assemblage de 42 blocs. ©Laurent Ardhuin
. Bérengère, recto/verso et détails @Sophie Sear